Son amour n’égale pas le mien

Michel Lambert (1610 - 1696): Ma bergère est tendre et fidelle, air de cour (1689). Stephan van Dyck, tenore; ensemble Musica Favola.

Ma bergère est tendre et fidelle,
Mais, hélas!, son amour n’égale pas le mien:
Elle aime son troupeau, sa houlette et son chien,
Et je ne sçaurois aimer qu’elle.

Non parlatemi più d’amore

Pierre Guédron (c1566 - c1620): Qu’on ne me parle plus d’amour, air de ballet (air de cour) tratto dal Ballet des inconstants (1608). Le Poème Harmonique, dir. Vincent Dumestre.

Qu’on ne me parle plus d’amour,
L’inconstance règne à la Cour,
Ô Dieux punissez ces âmes volages,
Ô Dieux punissez ces légers amoureux.

Ces amants pour nous décevoir
Jurent Amour et son pouvoir:
Ô Dieux punissez ces âmes parjures,
Ô Dieux punissez ces légers amoureux.

Ils n’ont de la fidélité
Sinon pour la déloyauté:
Ô Dieux punissez ces cœurs infidèles,
Ô Dieux que n’ont-ils leurs cœurs dans les yeux.

Ils feignent plus de passion
Lorsqu’ils ont moins d’affection:
Ô Dieux punissez ces cœurs infidèles,
Ô Dieux punissez ces légers amoureux.

La foi de ces esprits moqueurs
Fuit par leurs bouches de leurs cœurs:
Ô Dieux punissez ces cœurs infidèles,
Ô Dieux punissez ces légers amoureux.

gallica

Égal aux dieux

Antoine Boësset (1587 - 8 dicembre 1643): À la fin cette bergère, air de cour (1624). Le Poème harmonique, dir. Vincent Dumestre.

A la fin cette bergere
Sent les maux que j’ay soufferts,
Et sa foy jadis legere
Perd ce tiltre dans ses fers:
 Nous vivons soubs mesme loy
 Puis que je la tiens à moy.

Non, je n’ay plus cette crainte
Que j’avois par le passé:
Car Phillis se trouve attainte
De ce trait qui m’a blessé.

Mes feux ont produit sa flame
Qui me rend esgal aux dieux,
Et l’amour est dans son ame,
Qui n’estoit que dans ses yeux.

Mon amour recompensée
N’aura plus de desplaisir,
Nous n’avons qu’une pensée,
Qu’un vouloir, & qu’un desir.

Boesset

È Marte?

Il francese Pierre Guédron (c1566 - c1620), cantante e compositore, scrisse pregevoli airs de cour; uno di questi, Est-ce Mars? (1613), ebbe una certa notorietà e ispirò brillanti variazioni a diversi musicisti dell’epoca: le più famose sono opera di Jan Pieterszoon Sweelinck (1562 - 1621).
Del testo di Est-ce Mars?, adespoto, sono noti soltanto i primi quattro versi; ma in tempi recenti il poliedrico artista svizzero Gaël Liardon (1973 - 2018) ne aggiunse altri trentadue, assai spiritosi:

Est-ce Mars, le grand dieu des alarmes,
Que je vois?
Si l’on doit en juger par ses armes,
Je le crois.
Son carquois semble rempli d’éclairs,
Fuyons, fuyons! Tous à couvert!

Rajustant mes lunettes, j’observe
Que ce n’est
Pas le frère ombrageux de Minerve
Qui m’effrai’.
C’est le fils de Vénus, quel beau jour!
C’est Cupidon, le dieu d’Amour!

Mais à peine ai-je pu reconnaître
Ce charmeur
Qu’une flèche enflammée pénètre
Dans mon cœur.
En hurlant, je m’écroule à ses pieds
Ainsi qu’un arbre foudroyé.

Puis survient un troisième prodige :
Quel émoi!
Il se change en Vénus callipyge
Devant moi!
Et la flèche en mon cœur se faufil’
Jusque dans mon talon d’Achill’.

Fou d’amour, je gémis, j’agonise,
Implorant.
Mais la belle est myope et méprise
Mon tourment.
Sans un mot, elle lève les yeux
Et s’en retourne dans les cieux.

La morale à la fin de la fable,
La voilà:
Lorsque Mars apparaît très affable
Et qu’il a
Les appas d’une nymphe, crois-moi,
C’est un nouveau cheval de Troi’!


Delle variazioni di Sweelinck si trovano in rete varie interpretazioni; ho scelto quelle di Ernst Stolz al virginale e Matteo Imbruno all’organo della Chiesa evangelica di Uttum, ma altre sono altrettanto belle e interessanti.



Sopra Est-ce Mars? il compositore nederlandese di origine piccarda Nicolas Vallet (c1583 - c1642) scrisse per un insieme di quattro liuti alcune variazioni, l’ultima delle quali in tempo di courante (danza in ritmo ternario); sono qui eseguite da Les Luths Consort.


La raccolta di musica tastieristica cinque-secentesca nota come Fitzwilliam Virginal Book contiene una breve serie di varazioni composte da Giles Farnaby sulla stessa melodia di Est-ce Mars? ma con il misterioso titolo di The New Sa-Hoo. Qui di seguito l’interpretazione di Stolz e un arrangiamento per 5 ottoni eseguito dal Leipziger Blechbläser Quintett.



Mieulx le mal que le remède

Michel Lambert (1610 - 29 giugno 1696): D’un feu secret je me sens consommer, air de cour (pubblicato in Airs à une, II. III. et IV. parties avec la basse-continue, 1689, p. 53). Les Arts Florissants, dir. William Christie.

D’un feu secret je me sens consommer
Sans pouvoir soulager le mal qui me possède;
Je pourrois bien guérir si je cessois d’aymer,
Mais j’ayme mieux le mal que le remède.
Quand je mourrois, pourroit-on me blasmer?
Qui commence d’ayme, ne doit-il pas poursuivre?
Quand on sçaura, Philis, que j’ay cessé d’aymer,
On sçaura bien que j’ay cessé de vivre.

Graves tesmoins des mes delices

Constantijn Huygens (1596 - 28 marzo 1687): Graves tesmoins, air de cour, n. 34 della raccolta Pathodia sacra et profana (1647). Cyril Auvity, tenore; Myriam Rignol, viola da gamba; Marie van Rhijn, organo.

Graves tesmoins de mes delices,
Chesnes touffus, beaux precipices,
Que j’ay veu tant d’estez,
Jaloux et glorieux de mes felicitez.

Adieu, deserts, puisqu’Amarante,
L’ingrate amante,
Ne gouste plus vos ombres ny ma voix,
Vous n’estes plus mes bois.

N’attendez plus que je me rende
Où autre que l’Amour m’entende:
La seule Echo me nuit,
Et l’ombre qu’il me faut c’est l’eternelle nuict.

Adieu, deserts…

A Musicall Banquet – XIV. Vous que le bonheur rappelle

Pierre Guédron (c1565 - c1621): Vous que le bonheur rappelle, air de cour (pubblicato a cura di Robert Dowland in A Musicall Banquet, Londra 1610, n. XIII). The Consort of Musicke, dir. Anthony Rooley.

Vous que le bonheur rappelle
à un servage ancien,
mourez aux pieds de la belle
qui vous daigne faire sien.

Glorieuse en votre perte,
honorez votre vainqueur,
qui vous a la porte ouverte
de la prison de son coeur.

Heureux venez vous donc rendre
à celle qui vous a pris;
c’est honneur de se voir prendre
à qui tient tout à mépris.

L’honneur d’un brave adversaire
honore votre trépas,
heureux qu’en mourant peut faire
que son nom ne meure pas.

A Musicall Banquet – XIII. Ce penser

Pierre Guédron (c1565 - c1621): Si le parler et le silence, air de cour (pubblicato in Airs de différents auteurs mis en tablature de luth par Gabriel Bataille, Parigi 1608; poi a cura di Robert Dowland in A Musicall Banquet, Londra 1610, n. XII). Nigel Rogers, tenore; Anthony Bailes, liuto.

Ce penser qui sans fin tirannise ma vie
se montre tellement contre moi conjuré,
que tant plus jé m’efforce à dompter son ennuie
at tant moins à mon bien je le vois préparé.

J’ai quitté la beauté dont il a pris naissance,
espérant par l’oublie ses charmes décevoir
mais je trouve à la fin que la venue et l’absence
sont tous deux différents, et d’un même pouvoir.

J’ay maintefois juré du change faire espreuve
Pour faire qu’un dessein fust par l’autre deffait,
Mais à toutes les fois, aussi tost je me treuve
Infidelle en parole, & fidelle en effect.

J’ay des plus fiers dedains la puissance empruntée
Pour repousser le trait dont j’ay le coeur attaint,
Mais plus je recognois par par leur force domptée
Ma douleur veritable & mon remede feint.

Ainsi donc combatant le mal qui me possede
Sans voir par ces moyens ses tempestes calmer,
Je me vay consommant dans mon propre remede
Comme un Vaisseau qui brusle au milieu de la Mer.

Voilà comme en vivant en toute servitude
Je nourris un penser dont l’impiteux effort,
Se montre en mon endroit si plain d’ingratitude
Qu’en luy donnant la vie il me donne la mort.

A Musicall Banquet – XII. Si le parler

Pierre Guédron (c1565 - c1621): Si le parler et le silence, air de cour. Catherine King, soprano; Jacob Heringman, liuto.

Si le parler et le silence
nuit à notre heur également,
parlons donc, ma chère espérance,
du coeur et des yeux seulement;
    Amour ce petit dieu volage
    nous apprend ce muet langage.

Que le regard vole et revole,
messager des nos passions,
et serve au lieu de la parole
pour dire nos intentions.
    Amour ce petit dieu volage
    nous apprend ce muet langage.

Mais si quelque âme est offencée
de nous voir discourir des yeux,
nous parlérons de la pensée,
comme les anges dans les cieux.
    Amour ce petit dieu volage
    nous apprend ce muet langage.

Ainsi par un doux artifice
nous trompérons les courtisans,
et nous rirons de la malice
de mille fâcheux médisans,
    qui n’en sauront pas d’avantage
    ignorant, ce muet langage.

Si le parler è il primo dei tre airs de cour di Pierre Guédron inclusi da Robert Dowland nella raccolta A Musicall Banquet (Londra 1610, n. XI).
Air de cour è in sostanza il nome dato alla chanson francese d’autore nel periodo compreso tra la fine del Cinquecento e il quarto decennio del secolo successivo (corrisponde dunque grosso modo all’età aurea dell’ayre inglese). Fra i principali esponenti di questo genere, oltre a Guédron spiccano Antoine Boësset e Étienne Moulinié: nomi che ricorreranno con una certa frequenza in questo blog.

Charmes & alarmes

Michel Lambert (1610 - 29 giugno 1696): Vos mespris chaque jour, air de cour (pubblicato in Airs à une, II. III. et IV. parties avec la basse-continue, 1689, p. 186). Stephan van Dyck, tenore; ensemble Musica Favola.

Vos mespris chaque jour me causent mille alarmes,
Mais je chéris mon sort, bien qu’il soit rigoureux,
Hélas! si dans mes maux je trouve tant de charmes,
Je mourrois de plaisir si j’estois plus heureux.